"Transformation des contenus et des modes d'écoutes de la radio dans le contexte numérique"... Voilà le sujet de thèse d'un étudiant, qui vient de présenter ses premiers travaux au Groupe de Recherche et d'Etude sur la Radio. Rencontre avec ce Doctorant : Judicael Prigent. |
L’évolution du mode de consommation de la radio, le décrochage d’une large partie du jeune public …
Un Doctorant de Sorbonne Nouvelle s’attaque au sujet !
Déjà major de promotion d’un master en Arts, Lettres et Civilisation, il est aussi diplômé en Photojournalisme.
Le sujet de sa thèse :
"Transformation des contenus et des modes d'écoutes de la radio dans le contexte numérique" sous la direction de Hervé Glevarec, directeur de recherche au CNRS.
Vendredi dernier à la fac de Nanterre, à l’invitation du GRER, le Groupe de Recherches et d’Etudes sur la Radio,
il a présenté ses premières réflexions en prenant 2 exemples de médias,
qui savent s’adapter au jeune public …
Rencontre avec Judicael Prigent.
"Popcorn c’est une émission diffusée sur Twitch tous les mardis et qui fidélise en moyenne 50 000 spectateurs simultanés.
Elle n’est pas produite par des professionnels de la radio mais par des créateurs de contenu qu’on appelle des streamers,
mais dans sa structure on retrouve tous les codes d’émission traditionnelle :
un animateur principal avec des chroniqueurs qui peuvent changer de semaine en semaine, des invités différents.
Tous les corps de métier, tous les styles sont représentés,
il y a également des youtubeurs, des streamers …
Surtout ils jouent à fond l’interaction avec le public grâce au chat mis à disposition de tous. Pour le jeune public c’est un espace qu’il ne retrouve pas aujourd’hui sur les radios traditionnelles.
L’autre exemple c’est 3CFM,
une offre thématique qui parle à 100% de catch et qui du coup amène un public assez particulier.
Elle est disponible sur youtube, qui n’est pas à proprement parler une plateforme de streaming en direct,
l’internaute y trouve principalement des contenus en différé mais elle permet quand même quelques lives.
De ce fait, de la même manière que sur Twitch, il y a une forte interactivité grâce au chat.
Pas besoin d’images, les créateurs de contenus qui la produisent ne proposent que quelques illustrations et très peu de texte,
sinon simplement pour donner une identité visuelle au programme.
Popcorn ou 3CFM, ...
Dans les 2 cas ce n’est pas vraiment de la radio, mais pour autant on peut les écouter sans les regarder …"
Mais alors quelle est la différence avec les offres purement radiophoniques qui existent depuis des dizaines d’années,
comme "le téléphone sonne", "les auditeurs ont la parole" ou encore "les grandes gueules" ?
"Les radios et leurs émissions interactives aujourd’hui ne répondent plus aux problématiques ou aux envies des jeunes personnes,
elles ne cernent plus les thèmes qui les touchent, ou elles ne savent plus s’adresser à eux.
Ce n’est pas qu’une question de forme, c’est surtout une problématique de fond.
La dernière, très populaire à l’époque, a été "Lovinfun" en comprenant bien que les jeunes avaient besoin de se questionner sur leur sexualité et de parler à des gens facilement accessibles,
sans devoir se rendre chez un psychologue ou chez un sexologue.
Après une interruption, elle avait été reprogrammée en 2014 mais s’est arrêté en 2021.
Parce qu’aujourd’hui pour ce type de questionnements comme pour d'autres,
les jeunes gens vont sur internet.
L’outil "radio" leur apparaît dépassé !
Ce type de contenus est désormais plus consommé en podcast.
Mais attention, il faut que l’écriture soit, là aussi, aussi en phase avec eux …"
C’est le travail proposé par certaines offres disponibles sur le web qui traitent de tous les sujets, y compris de l’actualité pure,
comme celles d'HugoDécrypt et son équipe par exemple …
"En effet, même si l’image pour le coup est une composante essentielle de ses publications !
Il y a également des médias traditionnels qui investissent ce marché du jeune public comme France Info avec Game of Rôles lors des présidentielles par exemple.
C’était un jeu de simulation diffusé sur Twitch pour inciter les jeunes à aller voter …
Pendant trois heures, les joueurs se sont improvisés candidats et ont livré leur programme pour le scrutin.
Et Jules de Kiss, journaliste de France Info, intervenait régulièrement dans le jeu pour rappeler des faits, des chiffres, des données.
Voilà un exemple d’offre innovante mais qui reste assez méconnu de la cible des 14-25 ans.
Ce que disent nombre d’études en tous cas, c’est que les jeunes se montrent beaucoup plus intéressés par l’actualité grâce à la profusion d’applis disponibles,
et auxquelles ils ont facilement accès sur leur smartphone."
Donc les savoir-faire pour cibler ce jeune public existent,
mais les médias traditionnels, peut-être pour une question d’image, ont du mal à leur faire savoir ?
"Il faut se dire que le public jeune, mine de rien, doit consacrer un temps à l’information et ce temps-là il ne l'a peut-être pas,
ou bien il le consacre à des jeux ou du divertissement.
Les médias qu’ils consomment doivent en tous cas adopter ses codes, dans le fond comme dans la forme.
C’est l’objet de ce travail de recherche universitaire que j’entreprends et qui durera plusieurs années.
Cela regroupe plein de thématiques et plusieurs types de sciences comme la sociologie et la science de l’information,
avec évidemment l’étude fine de l’évolution des audiences avec, donc, une part de mathématique !
Je remercie d’ailleurs Médiamétrie qui vient d’accepter de m’accompagner dans ce travail,
et je suis à la recherche de contacts avec des médias qui s’investissent sur cette cible,
pour ensemble tenter de dresser un état des lieux très documenté de l’évolution du mode de consommation des médias."
Le GRER, le Groupe de Recherches et d’Études sur la Radio a été fondé avec pour but d’aider à la connaissance, à la reconnaissance et au développement des études radiophoniques en France.
Constatant la faible part et le peu d’attention réservées aux études sur le média radiophonique dans le monde scientifique en général,
et celui des sciences de l’information et de la communication en particulier, des spécialistes de la recherche sur la radio se sont associés au tournant des années 2000,
afin de créer le Groupe de Recherches et d’Études sur la Radio à Bordeaux.
Depuis 2020, l‘association est présidée par Etienne Damome, professeur à l’Université Bordeaux Montaigne.
Thierry Mathieu,
Président d’e-crosmedia,
le 15 mai 2023.
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