« Cross Frontière Média » : France Télévisions et la RTBF innovent à Lille et Mons. Une équipe de TV française est désormais implantée dans les locaux de la télé publique belge. Entretien avec Erik Berg, directeur régional de France 3 Hauts de France.
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Plusieurs expériences transfrontalières de coopération entre médias publics ont été tentées depuis des années.
Autour du lac Léman coté télévision, par exemple, entre France Télévisions et la RTS,
un projet du coté des Ardennes a été imaginé aussi entre la RTBF et Radio France sous la présidence de Jean-Marie Cavada, sans aboutir faute de financement.
Cette fois, c'est du concret !
Des journalistes de la télé publique française régionale à LIlle travaillent au quotidien dans les locaux, et avec leurs confrères, belges.
La convergence des médias contribue à incarner le projet européen au service des publics, qu'ils soient d'un coté ou de l'autre d'une frontière.
L'ambition, c'est d'allier les proximités : affective et géographique !
Coup de fil à Erik Berg , Directeur Régional de France 3 Hauts de France.
"Une équipe de journalistes de France Télévisions, c’est-à-dire un Journaliste Reporter d’Image et une Rédactrice, est désormais en poste à Mons, accueillie par la RTBF, la télé de service public francophone, en Wallonie.
Ils sont réellement en immersion.
Ils participent à la conférence de rédaction de nos confrères belges. Ils partagent les contacts et les choix éditoriaux, tant pour la télé que pour le numérique.
Ils travaillent donc ensemble et s’enrichissent mutuellement de leurs regards croisés.
La perception française ou wallonne sur tel ou tel sujet n’est parfois pas la même…
Cela donne un double regard sur l’actualité locale : vu de la France et vu de Belgique.
Parce qu’en vivant dans le même bassin de vie, même s’il est traversé par une frontière, le "vécu" n’est pas le même ?
Ce bureau est né d’un constat, durant le confinement …
Quand la France a décidé au début de la crise Covid de fermer tous les commerces sauf ceux de première nécessité, les Belges avaient fait un autre choix.
Les restaurants par exemple étaient restés ouverts chez eux, même s’il y avait quelques restrictions.
Dans un même village donc, à quelques rues d’écart, 2 réponses différences à la crise étaient apportées.
C’est là que je me suis dit mais c’est fou !
Mais finalement, cet exemple criant de perception différente au moment de la crise existe au quotidien, sur beaucoup de thématiques :
l’hôpital public, les urgences, les écoles, même le fleurissement des villages !
Il y a des exemples très concrets de solutions différentes qui sont trouvées, selon qu’on se trouve de l’un ou de l’autre côté de la frontière.
Ces reportages "Vu de Belgique" tournés par votre équipe de France Télévisions seront donc diffusés sur France 3 Nord-Pas de Calais,
mais les wallons y auront aussi accès ?
Evidemment !
Mais au-delà du travail de nos 2 collaborateurs à Mons, cet accord concerne toute l’offre d’info, des 2 cotés.
Les rédacteurs en chef travaillent désormais ensemble, depuis Lille et Mons.
Il n’y a plus un jour sans que la RTBF ne sache ce que va diffuser France 3 dans les Hauts de France, et réciproquement.
Ils échangent dès le matin les conducteurs de leurs journaux respectifs.
Ça paraît tout bête mais cela n’existait pas.
Maintenant on se dit : tiens, tel ou tel sujet que traitent nos confrères belges nous intéresse.
On peut apporter en complément avec un reportage sur le même thème, mais "vu de France ".
C'est une manière d'être concernant pour nos publics.
Il y a quelques 40 000 personnes qui traversent tous les jours les 300 kilomètres de notre frontière commune pour aller travailler.
Ce sont aussi parfois des couples mixtes franco-belges …
La coopération entre médias : vous êtes novateurs en l’occurrence !
Moi je pense que les médias publics ont intérêt en effet à collaborer, à s’entendre, à échanger.
On est dans un monde qui s’est ouvert, avec des usages qui ont changé !
Les jeunes publics, particulièrement, vont consulter les informations sur leurs smartphones, leurs applications …
Et nous on se doit d’être pourvoyeur de qualité...
L’avantage entre acteurs de service public, y compris de pays différents, c’est qu’on partage les mêmes valeurs, on est soumis à peu près aux mêmes contraintes …
Il n’est donc pas difficile de travailler ensemble, il suffit juste de se connaître un peu.
Il faut surtout que cette évolution soit resentie comme très "humaine" par les collaborateurs.
Je l’ai dit ce mercredi à l’occasion de l’inauguration de de l’implantation de nos collaborateurs à Mons :
ce n’est pas une question d’économie, c’est une ambition éditoriale.
Moi je crois beaucoup à la notion de proximité.
Il faut se donner les moyens de diffuser des infos qui traitent de sujets au plus près de la vie des gens …
La proximité, ça se pense sur place et dans l’excellence, parce que si jamais vous dites une bêtise, ou si les gens ne s’y retrouvent pas, il n’y aura pas besoin d’intermédiaire pour vous le faire savoir.
Le coiffeur, le boucher que les journalistes rencontrent au café du coin leur diront.
Cette proximité réelle qui doit permettre de rétablir la nécessaire confiance avec les téléspectateurs ne peut se travailler que quand les structures sont pensées finement et bien implantées.
C’est l’ambition de cette initiative ".
Erik Berg,
actuellement directeur régional de France 3 Hauts de France sera dès le 10 octobre prochain, directeur de franceinfo-Edition TV.
Journaliste en radio et presse écrite, puis en télévision depuis 1986, il a occupé pour l’action régionale plusieurs postes de responsabilité au sein de France 3 et France 2 . Il a également été rédacteur en chef de Thalassa.
e-crossmedia, le 22 septembre 2022.
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