Quel avenir pour le service public audiovisuel d’action régionale ? France Bleu, le réseau des radios locales de Radio France, perd 350 000 auditeurs en un an selon Médiamétrie qui publie ce jeudi ses chiffres sur la période Avril-Juin 2023.…

 

Peu d’évolution significative dans le classement des radios publié ce matin par Médiamétrie.

Sur un an et surtout ces 3 derniers mois, l’ensemble du marché a toutefois, à nouveau, perdu un nombre d’auditeurs significatif …   

 

Sorry its not set :(

 

France Inter demeure leader avec exactement le même taux d’audience que l’an dernier à la même période : 12,5%.

RTL reste deuxième malgré un nouveau fléchissement : 320 000 auditeurs perdus en 3 mois.

France Info est stable sur un an sur la 3ème marche du podium.

Suivent NRJ, stable également,

puis sa sœur Nostalgie en forte progression elle : à 6,2 % le réseau musical "adulte" est donc désormais 5ème radio de France.

Arrivent ensuite Skyrock,

puis RMC avec le même score qu’au printemps 2022.

Parailleurs, à souligner la belle progression des 129 stations du groupement des Indéradios :

elles totalisent 12,8% d’audience.

 

Sorry its not set :(

 

2 stations poursuivent leurs descentes aux enfers :

Europe1, désormais à seulement 3%,

et le réseau des radios locales de Radio France.

 

Avec 4,5 % en audience cumulée sur cette vague, les 44 France Bleu perdent 350 000 auditeurs en un an.

Mais pourquoi donc, alors qu’en ces temps de globalisation le public est en recherche de proximité,

l’histoire de ce réseau s’écrit-elle aussi tristement ?

Les 3 premières stations locales de service public lancées à titre expérimental en 1980 sont à l’époque une révolution, avant même la libération des ondes au secteur privé.

Dédiées à la proximité, elles se multiplient pendant les années de décentralisation et évoluent de façon disparate durant une vingtaine d’années.

 

Sorry its not set :(

 

A l’approche de l’an 2000 ce réseau est fédéré au sein d’une nouvelle marque, "France Bleu".

L’objectif de Radio France est de s’appuyer sur les locales pour rendre service à une large part de la population, et la séduire ...

Celle qui écoute peu les radios de service public, perçues comme élitistes, et qui leur préfère les périphériques ou les musicales privées.

 

Le défi est ambitieux…

Un plan d’action unique en France d’actualisation des savoir-faire de l’ensemble des collaborateurs est lancé,

les lignes éditoriales et musicales sont repensées,

la rythmique et les habillages sont travaillés pour coller à l’époque et être en phase avec les attentes du plus grand nombre …

L’entreprise publique investit alors, mais ce n'est plus le cas depuis des années, pour honorer l’une de ses missions écrite bleu sur blanc à son cahier des charges:

la proximité.

Et elle parvient, y compris dans les grandes agglomérations:

Radio France conquiert de nouveaux publics.

A tel point que le réseau atteint 8 % d’audience, comme en témoigne cette publication d'avril 2013.

 

Sorry its not set :(

 

Nombre d’observateurs noterons qu’alors, les gentils "cousins de province" commencent à être regardés à la Maison de la radio avec moins de sympathie,

même s’ils contribuent beaucoup par le maillage du territoire à la richesse des journaux de France Inter et France Info.

Les courbes d’audiences tendent à se resserrer, comme les budgets alloués à l’action régionale…

Les observateurs dénoncent alors le fait que le réseau des locales devient la variable d'ajustement budgétaire pour l'ensemble du groupe.

La stratégie globale tend à considérer dans le même temps "France Bleu" comme une seule station,

alors que c’est bien évidemment l’addition des talents des 44 radios, et leur adaptation fine à chaque contexte, qui demeure la raison d’être du réseau et la clé de son succès.

L'ADN c'est bien la proximité...

Des figures "nationales", parfois venues de la télé et exposées sur l'ensemble des stations, ne remplacent pas le lien unique d'un animateur ou d'un journaliste,

connaisseur des spécificités de son terrain.

 

C’est l’époque où, par ailleurs, la nation commence réellement à se déchirer.

Le public dit "populaire" qui se sent laissé pour compte des décisions prises à l’échelon central parisien, se retrouve pour beaucoup à l’écoute de ce réseau de radios locales.

Ses ondes sonnent moins conformistes ou consensuelles que nombre d’antennes nationales.

Et pourtant ...

Aberration stratégique :

c'est à ce moment que les émissions d'interactivité dédiées à l'actualité disparaissent sur décision de la tête de réseau.

Conséquence :

les stations deviennent un peu moins le haut-parleur de leurs territoires, alors que c'est leur raison d'être.

 

Sorry its not set :(

 

Exit la promesse "Vu d’ici" fédératrice et novatrice...

20 ans plus tard, les équipes de France 3 construisent le même projet avec les éditions régionales qui seront réalisées depuis chaque région à la rentrée,

avec le projet "Tempo" sur les tranches d'info 12-13 et les 19-20.

 

Le slogan du réseau France Bleu devient alors : "On est bien ensemble".

C'est pourtant à ce moment que survient dans la France dite "périphérique" le mouvement des gilets jaunes qui démontre le contraire !

Profonde erreur : dans le fond, comme dans la forme !

D'autant que, sous couvert de contraintes budgétaires, les 44 stations ne sont pas en mesure de couvrir les manifestations des samedis après-midi.

 

Arrive ensuite la Covid 19 et la mise en place de "syndications d’antennes" :

les 44 stations n’ont plus rien de local et faillissent alors à leur mission de proximité, dans une séquence pourtant cruciale pour les auditeurs confinés chez eux,

dans le but affiché de protéger les salariés…

 

Par-dessus tout s’impose évidemment le web et les nouveaux modes de consommation des médias qui, pour le réseau des locales comme pour toutes les stations,

donne un coup de vieux aux offres traditionnelles, malgré de remarquables efforts sur internet au travers les offres numériques.

 

Sorry its not set :(

 

"ICI" :

c’est le nom du portail mis en place avec France Télévisions, qui diffuse sur le web et en parallèle des antennes les infos de proximité,

collectées par les 44 France Bleu et les 24 stations régionales de France 3.

 

L’autre coopération mise en place avec l’entreprise de télévision publique, pour satisfaire aux attentes de la tutelle, est surtout la co-diffusion des matinales radios en télé,

même si l’ensemble des stations ne l’est pas encore.

 

Du coté de Radio France on parle d’émissions "filmées",

comme si le pas vers le crossmedia n’osait pas être franchi pour des raisons de dialogue social et du fait d’un conservatisme affirmé d’une partie des personnels.

 

Sorry its not set :(

 

Du coté de FTV, l’essentiel des équipes fait peu de cas de ces 2 heures d’antennes quotidiennes,

considérant que leur entreprise ne fait que diffuser une offre qui leur demeure étrangère.

Les synergies au quotidien entre gens de radio et gens de TV restent à construire.

France Télévisions, avec ses 9 implantations outre-mer, sait pourtant maitriser l’exercice et faire qu’une offre radio ait aussi une valeur ajoutée sur le petit écran !

 

Sorry its not set :(

 

 

En point d'orgue à ce qui ne serait être lu ou entendu comme un Requiem,

voici la communication de la Présidente de Radio France dont le regard de toute évidence ne dépasse pas le périphérique parisien :

"La bonne santé de nos radios montre la pertinence de chacune d’entre elles et la complémentarité de la gamme des radios de service public.

Aux Français, nous voulons proposer l’offre la plus qualitative et la plus diversifiée possible pour que le service public s’adresse à tous.

Et ce, quelles que soient leurs pratiques d’écoute : l’avenir de Radio France se construit sur 2 jambes, un direct solide saison après saison et un leadership numérique toujours en croissance" .

 

Pourtant ...

Tombées à 4,5 % d’audience au plan national, les 44 radios locales, dont le concept a longtemps été exemplaire y compris à l'international,

sont en sérieuse difficulté…

L’heure est sans doute venue de repenser dans son ensemble l’offre du service public audiovisuel de proximité,

en collant aux attentes et aux modes de consommation des médias :

en mode "Un pour tous, tous pour un" : le public !

 

Thierry Mathieu,

Président d’e-crossmedia,

le 12 juillet 2023.

 

 

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