"C’est une faute de la presse française,
désormais occultée par l’euphorie du moment,
mais néanmoins patente :
pendant plusieurs mois,
la plupart des articles consacrés aux Jeux Olympiques annonçaient le pire."
Laurent Joffrin nous parle d’un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître,
c'est à dire avant l'émergence
des smartphones
et des réseaux sociaux !
Ce lundi, l’édito de cette grande signature de la presse hexagonale,
publié sur le web-média qu’il s’est lui-même créé,
entend dénoncer à propos du bashing de Paris 2024
la responsabilité des journalistes.
"On dira que c’est le rôle de la presse que de chercher les failles, les erreurs, les manques,
qu’elle joue légitimement sa partie en aiguillonnant les pouvoirs publics pour s’assurer qu’ils fassent diligence.
Certes.
Mais qui ne voit le décalage ridicule entre l’avant et l’après,
entre la prévision et le fait,
entre l’impéritie supposée de la préparation et la réussite de la réalisation ?
Il y a là plus qu’un contraste fortuit :
un phénomène directement politique. "
Au-delà de ses interventions sur les radios et télévisions traditionnelles,
Laurent Joffrin publie désormais ses écrits sur internet
et est largement "fowardé",
aujourd’hui avec cet édito sur les réseaux sociaux.
Lui qui a dirigé la rédaction du Nouvel Observateur puis de Libération jusqu’au 14 juillet
il y a 4 ans
ne semble pas, pour autant,
avoir fait sa révolution …
Désormais engagé clairement en politique avec son mouvement des "Engagé.e .s",
il semble nous dire les journalistes sont reponsables du climat délétère ambiant et globalisé.
Cela revient à reconnaître
aujourd'hui encore
un rôle fondamental aux médias traditionnels,
longtemps affublés du label "4ème pouvoir",
qu’ils n’ont manifestement plus tout à fait !
C’est dénier l'impact des réseaux sociaux désormais plus puissants que la presse traditionelle ,
singulièrement pour les plus jeunes.
Pourtant ...
Comme l’écrit déjà il y a presque un siècle, en 1927,
le chercheur américain
Harold D. Lasswell …
"Contrairement à ce qu’affirment ces théories qui voudraient que les messages médiatiques infusent sans filtre et influencent directement les consciences du public,
la sociologie de la réception a depuis longtemps montré que les croyances et les opinions se façonnent essentiellement dans les groupes primaires
comme les cercles familiaux, amicaux ou professionnels.
Si les informations véhiculées par les médias exercent quelque influence,
elles ne sont perçues et reçues qu’à travers les grilles d’interprétation partagées
et négociées avec les environnements sociaux qui constituent le cadre d’existence des individus.
Le sociologue britannique Richard Hoggart ajoute en 1970 :
"Les pratiques concrètes de "consommation" des médias interdisent d’y voir un pouvoir capable de modeler les opinions :
les individus ne choisissent pas par hasard les médias qu’ils suivent préférentiellement,
et ils font en sorte d’être surtout confrontés à des messages ne heurtant pas leurs opinions préconstituées.
Cette exposition sélective aux flux de messages médiatiques se conjugue souvent à une "attention oblique",
à la fois nonchalante et défiante, portée par les publics populaires sur les contenus diffusés dans les médias dominants."
Laurent Joffrin pourtant persiste et signe dans son édito qui entend faire aujourd’hui grand bruit …
"Les mêmes journaux s’interrogent gravement sur
"la montée du populisme",
le "discrédit de la classe politique",
la "progression des extrêmes",
la "brutalisation du débat public ", etc.
Peut-être pourraient-ils aussi se poser la question de leur propre responsabilité.
Au lieu de séparer le bon grain de l’ivraie, de critiquer les dirigeants défaillants, mais de reconnaître les mérites des autres,
ils les englobent dans une universelle défiance, pour ne pas dire une systématique condamnation.
À force de traîner dans la boue tout ce qui encadre la démocratie, bien ou mal, ils finissent par miner la démocratie elle-même.
On s’étonne après de voir une partie croissante de l’opinion soupirer après un pouvoir fort, soutenir, à l’extrême-droite ou à l’extrême-gauche,
ceux qui promettent de "jeter à bas le système",
de congédier "les élites", de raser gratis en "mettant le peuple au pouvoir" (c’est-à-dire eux-mêmes).
Le dénigrement systématique des élites démocratiques par les élites journalistiques n’est pas seulement un paradoxe.
C’est une aberration politique."
N'est-ce pas décrocher la médaille du déni de réalité ?
Pour nombre d’observateurs depuis les années 2000,
Internet et les réseaux sont en réalité les médias qui véhiculent et modèlent l’opinion
comme l’ont démontré les séquences des gilets jaunes, des révolutions arabes, du Brexit, de l’élection de Donald Trump,
ou encore de la montée de l’extrême droite en Europe,
sans parler des mouvements Wikileaks, ou #BalanceTonPorc, etc…
Thierry Mathieu,
e-crossmedia,
le 5 aout 2024.
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