C'est une annonce sobre diffusée sur les Réseaux Sociaux,
mais c'est une première,
un évènement.
Les auditeurs connaissent les "Editions Spéciales " fréquentes en cas d'actualité chaude
durant lesquelles le conducteur réglé comme une mécanique de précision est mis de côté...
Durant 4 heures ce soir,
c'est carrément le format de la station, le temps d'une nuit, qui évolue.
La chaîne d'info continue de service public ouvre son antenne à l'interactivité à l'occasion du 1er tour de l'élection antincipée
de 1 heure à 5 heures du matin ce lundi.
Après la soirée électorale,
2 journalistes donneront la parole aux auditeurs,
ce qui n'est pas dans l'ADN de cette station depuis sa création en juin 1987,
aujourd'hui 3ème radio de France .
L'interactivité à propos de l'actualité, inventée par la radio de service public dans les années 50,
est aujourd'hui encore l'un des pilliers de la généraliste France Inter
leader depuis 4 ans
avec du lundi au vendredi l'emblématique "Téléphone sonne".
L'interactivité est aussi l'un des pilliers de l'offre des radios locales de service public.
Même si les 44 France Bleu y reviennent maintenant
après avoir maladroitement levé le pied durant quelques années sur ce type de tranche.
A la veille du mouvement des Gilets Jaunes,
le choix stratégique de la direction du réseau avait été de supprimer les sessions d'interactivité dédiées à l'actualité,
comme pour honorer la promesse du slogan du moment :
La réalité a démontré le contraire,
singulièrement dans la France dite "périphérique" où réside la majorité des auditeurs de ces antennes.
Et à lire les courbes,
c'est justement à cette époque que les résultats d'audience de France Bleu ont commencé à flèchir inexorablement.
Une part de leur promesse de "proximité" a été mis en sourdine
et ca a manifestement coûté cher ...
Et pourtant dans les années 80 ,
Jean Pierre Farkas, l'un des patrons de ce même réseau qui se développait à l'époque,
alors nommé "Radios Locales de Radio France",
avait coutume de dire:
"Ces radios doivent être le forum des idées,
être actrices de la vie de leur région,
permettre la démocratie locale et le débat à l'antenne,
à la manière de Lorraine Coeur d'acier " ...
C'est historiquement en effet la libération de la bande FM, qui a permis au plus grand nombre de s'exprimer sur les nombreuses radios associatives.
La parole s'est alors libérée de manière totalement débridée sur ces "RLP"
et les grandes stations institutionnelles ont à leur tour ouvert leurs programmes à leurs auditeurs.
Comme RTL avec "Les auditeurs ont la parole" depuis plus de 40 ans,
Europe1 avec ces derniers jours encore l'émission animée par Cyril Hanouna,
RMC qui affiche son ADN d'info et de talk, avec le sport,
ou encore Sud Radio.
Ouvrir l'antenne aux auditeurs en direct à propos de l'actualité demeure un exercice singulier,
parmi les plus délicats.
C'est sans doute le type d'émission qui nécessecite le plus grand professionalisme pour les journalistes, les animateurs
et leurs équipes en régie et au standard
pour assurer la diversité des points de vue diffusés,
chercher à les équilibrer pour garantir le pluralisme,
et surtout ne pas tomber dans le piège de propos tenus par des auditeurs suceptibles de tomber sous le coup de la loi :
c'est dans ce cas le diffuseur qui est juridiquement responsable.
Il y a déjà 28 ans,
Didier Lapeyronnie, professeur de sociologie à l'université Victor Segalen de Bordeaux
et auteur d’une étude sur l’interactivité à la radio,
explique à Libération :
"La société est cacophonique !
Tout le monde peut avoir un avis sur tout.
puis le terme de cacophonie est péjoratif. En France, les institutions se méfient toujours de la société, de ses affects, de ses émotions.
Les responsables se disent : régulons tout cela, sinon cela va déraper !
Dans cette forme de régulation, il y a une idée de morale civique.
La conséquence, on la connaît : vous privez de parole une partie de la société, la plus faible, celle qui n'a pas accès à cette parole régulée et légitime.
Au fond, la question est de savoir si on veut que la radio, et les médias en général, soient une sorte de « voix de la France »
ou la voix des Français ".
"La société est devenue ouvertement raciste.
Les discriminations sont devenues générales.
On ne trouve pas un stage en entreprise quand on s'appelle Mohammed.
Et si vous allez au café du commerce, qu'est-ce que vous entendez ?
Je ne vois pas au nom de quoi il ne faudrait pas en discuter dans les médias.
On ne lutte pas contre le racisme en mettant une chape dessus".
Pour écouter franceinfo:
https://www.francetvinfo.fr/en-direct/radio.html
Thierry Mathieu,
e-crossmedia,
le 30 juin 2024.
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